Du 5 mars au 9 juin 2013 le musée d'Orsay propose une expo consacrée au romantisme noir, L'ANGE DU BIZARRE. Pour l'accompagnement musical j'aurai pu choisir des artistes récents THE CURE, CLAN OF XYMOX, BAUHAUS ou les français CONTRE JOUR mais une « petite » musique classique m'a semblé plus opportune. En l'occurrence, UNE NUIT SUR LE MONT CHAUVE du compositeur russe MODEST MUSSORGSKY (1839-1881) popularisé par le FANTASIA (1940) de DISNEY
Avant de pénétrer dans cette sombre dimension artistique, un peu de trivialité, chapitre que vous pouvez allégrement sauter car mes atermoiements risquent de vous ennuyer.
Tout d'abord, il fallut affronter la politique de circulation et de stationnement parisienne qui veut décourager les anciens parisiens et nouveaux franciliens que nous somme ayant émigrés de l'autre côté du périph à revenir à la capitale en auto. Ou, les contraindre à en repartir comme Cendrillon avant les heures ou les trains de banlieue se transforment en remake de LA HORDE SAUVAGE. Bref, résultat, stationnement hors de prix dans un des parking public qui ne soit pas complet, prés de St Germain.
Arrivés devant le musée d'Orsay à 15h50, diable pourquoi suis-je bête de n'avoir acheté mon billet sur internet ! Tant pis, welcome to Disney, avec ses files en colimaçons pleines de touristes lambda. Après plus ou moins 30 minutes d'attente une voix s'élève, il n'y à plus de places pour l'expo l'ANGE DU BIZARRE ! Déception partagée avec la moitié des gens qui font la queue et s'en vont, du coup ça avance plus vite. Le musée d'Orsay et ses expos permanentes étant tout de même une belle visite nous restons. Arrivés en caisse on nous demande si on souhaite expo permanente ou expo provisoire ? Tiens, en fait il s'avère que l'info précédente était erronée et... nous sommes tombé sur un guichetier sympa.
Grosse déconvenue, les photos sont interdites dans tout le musée ! Visiblement le patrimoine français doit rester caché, du moins celui d'Orsay car au Louvre, Versailles ou Beaubourg cela ne pose aucun problème. Comme cela m'énerve profondément je tombe dans l'illégalité la plus totale pour prendre quelques clichés volés que vous pourrez voir illégalement ici. Bon, mais le temps passe vite et à 17h30 débute l'évacuation ! Quel est ce monde ou Carrefour est ouvert jusqu'à 21h30 et les musées ferment à 18h00 ? Ah, il y à une nocturne.... quand ? le jeudi, ah oui, pratique pour les non parisiens qui bossent !
Voilà après toutes ces banalités passons à l'art avec un grand A. Pour moi qui suis passionné par le fantastique et qui m'intéresse à la l'art et la culture en général cette exposition était très attrayante, surtout de par l'œuvre choisie pour la couverture promotionnelle LA MORT ET LE FOSSOYEUR (1900) par CARLOS SCWHABE. Notons que ce n'est que la partie haute du tableau qui est reproduit sur l'affiche. Face à cette œuvre on ne peut que dire « la mort vous va si bien ». La pose gracieuse et élégante de cet ange noir et mortel est tout simplement magnifique et catalyse à elle seule le thème de l'expo : le romantisme noir. Je découvre cet artiste (allemand/suisse 1826-1866) dont certaines œuvres ont put inspirer les illustrateurs modernes de fantasy par leur côté fantastique-féérique ou épique, alors que d'autres sont très dérangeantes à la fois bestiales, sexuelles et terribles. Certaines ont d'ailleurs servi à illustrer LES FLEURS DU MAL de BAUDELAIRE.
Je ne vais pas m'étaler à réécrire ce qui se trouve au premier clic sur le net en tapant le nom de cet expo, il n'y aura donc ici rien de trop académique juste quelques informations et mes pensées désordonnées. Le sous-titre de l'expo est « Romantisme noir de GOYA à MARX ERNST ». C'est la première fois que je rencontre ce terme « Romantisme noir », à priori inventé par un critique d'art. En définitive, beaucoup des œuvres présentes dans l'expo se rattachent à la période artistique dite Romantique tout court. Le dénominateur commun de l'expo est ce que je qualifierai de fantastique-gothique (avec une terminologie geekienne). Le côté obscur de la nature, de l'humain, des mythes, et leur sombre beauté attirai visiblement les artistes bien avant notre 20° siècle. L'étrange et le bizarre, la mort, la damnation, le diable, les péchés, la sorcellerie, les monstres, .. voilà quelques uns des thèmes abordés ici sous l'angle de grands artistes peintres (majoritairement). Le siècle des lumières avait aussi sa part d'ombre.
Près de l'entrée on trouve des œuvres de FUSELI, notamment THOR COMBATANT LE SERPENT MIDGARD et le plus connu LES TROIS SORCIERES. HENRY FUSELI (1741-1825) , était un suisse qui s'appelait originellement JOHANN HEINRICH FUSSLÏ et changea de nom car à l'époque pour un peintre c'était sans doute plus tendance d'avoir un nom à consonance italienne et un prénom anglais, d'ailleurs il habitait à Londres car c'était surement le lieu de la hype de l'époque ( De nos jours un certain Jean philippe SMET se fait bien appeler JONNHY HALLIDAY et souhaite vivre en Belgique l'histoire, un éternel recommencement blablaba...). Son inspiration il la tient visiblement des mythologies et du folklore pré-chrétien germanique ainsi que des œuvres de SHAKESPEARE. Les corps y sont souvent représentés déformés et contorsionnés, et une myriade de créatures étranges et surnaturelles menacent notre santé mentale. Graphiquement il est inspiré par les travaux de MICHEL ANGE et emploi souvent la technique du clair-obscur. Je note aussi dans ses peintures les corps souvent dénudés d'hommes et femmes dans des situations qui sans équivoque, ont à mon sens une connotation sexuelle non dissimulée, et retranscrites de nos jours dans les médias modernes publicitaires, pop ou cinématographique ne manqueraient pas de susciter controverse.
On continue avec FUSELI et ce qui est sans doute son œuvre la plus connue LE CAUCHEMAR dont il a peint plusieurs versions, un peu comme on remixe une chanson qui à connu un certain succès. Et oui le monde actuel n'a rien inventé en terme de merchandising d'œuvres artistiques. Ce tableau à été exposée pour la première fois en 1792.
Puisque nous venons d'échapper à une fin du monde annoncée à travers tous les médias, l'œuvre de L'américain SAMUEL COLMAN (1832 -1920) nous prouve qu'Hollywood n'a rien inventé en terme de mise en scène de catastrophes. D'après ce que je constate, tout simplement en tapant le nom de l'artiste dans la boite magique google et recherche d'images, c'est que cet artiste à réalisé largement plus d'œuvres de paysages lumineux et paisibles que de tableaux sombres et inquiétants, VEILLE D'APOCALYPSE peint vers 1837 fait preuve d'exception. Cette fin du monde implosive me semble remplie de symboles que je ne saurait décoder, quel est ce personnage qui se tient au centre du tableau ? SHAKESPEARE semblerait-il. Quel est cet être ailé qui tombe tête la première dans le vide avec une faux dans la main et un sablier à ses côté. A quel ville réelle ou, imaginaire appartiennent ces bâtiments détruits ? Autant de question qui font de ce tableau une énigme ésotérique.
Le tableau suivant est sans doute l'un des plus impressionnant, par sa taille (2,81m x 2,25m) et par son thème, il s'agit de DANTE ET VIRGILE AUX ENFERS par le français WILLIAM BOUGUEREAU (1825-1905). L'inspiration est ici la visite aux enfer de DANTE ET VIRGILE qui assistent au combat de deux damnés, CAPPOCHIO ici mordu par SCHICCI. Je me suis ici aussi laissé-allé au google-image-test et force est de constater que cette œuvre est tout à fait atypique dans la carrière du peintre dans laquelle on rencontre plutôt angelots, enfants, femmes et tableaux lumineux. Visiblement ce fut un one-shot de sombritude violente réalisé en 1850 pour gagner un prix. La scène est foncièrement très brutale et pourrai aisément, selon la terminologie actuelle, être qualifiée de hardcore. Je remarque l'opposition entre DANTE ET VIRGILE se tenant stoïques, passifs et observateurs devant le combat bestial, très physique de CAPPOCHIO et SCHICCI.
On continu la visite des enfers avec DANTE et VIRGILE, cette fois sous le pinceau du peintre franco-hollandais ARY SCHEFFER (1795-1858). Nos deux hellnautes se trouvent ici confrontés aux ombres de FRANCESCA DA RIMINI et PAOLO MALATESTA dans un tableau peint en 1835. Ces deux damnés ont commis le pêché d'adultère et ont été tout deux poignardés par le mari qui les a surpris s'échangeant un baiser.
Les oeuvres exposées sont majoritairement des peintures mais ils y y à tout de même quelques sculptures ou photographies, ici c'est celle du sculpteur et graveur-médailleur AUGUSTE PREAUT (1809-1879). Son sujet c'est OPHELIE qui dans HAMLET de SHAEKSPEARE, se noie pensant que son amant ne l'aime plus alors qu'en fait qu'il n'en ai rien.
Voici trois œuvres représentant toutes une femme étrange. De droite à gauche, LES YEUX CLOS (1890) d'ODILON REDON (1840-1916), APPORT SPIRITE D'UN BRACELET (1887) de ALBERT VON KELLER (1844-1920) et LA FEMME EN BLANC (1900) de l'autrichien GABRILE VON MAX (1840-1915). C'est surtout cette dernière œuvre qui a retenue mon attention par sa beauté surréaliste et l'effet saisissant ( non apparent ici ) lié à la différence de texture entre le visage presque vivant et le drapé phantomatique du voile qui l'entoure. Côté anecdotes, GABRILE vivait avec une famille de singe qui lui servaient souvent de modèles, et quand pense qu'on qualifie MICHAEL JACKSON de bizarre, il n'en avit qu'un de singe lui...
Il est clair que ce petit tour d'horizon n'est pas exhaustifs et que de nombreuses autreS œuvres présentées lors de cette exposition auraient mérité de figurer ici, mais en mode « caméra cachée » pas facile de faire quelque chose de propre. Je n'ai pas accroché sur la dernière partie consacrée aux surréalistes et cela malgré le fait que j'apprécie cette période et l'art moderne mais les oeuvres présentées n'évoquaient pas assez pour moi le thème de l'exposition.
Je n'ai pas lu dans l'intégralité tous les panneaux de l'expo mais il me semble ne pas avoir vu beaucoup de références au terme « gothique », car si le terme romantisme noir est connu de quelques experts en art, le terme gothique est lui bien répandu au delà des cercles artistiques.
Gothique vous avez dit gothique tient comme c'est gothique !
Car c'est bien de cela qu'il s'agit une expo qui nous plonge aux racines de ce mouvement trans-médiatique, trans-culturel et trans-historique. Mais le gothique au sens dont je parle est ou trop geek ou trop « pop » pour être abordé dans une telle expo. Malgré cela on découvre quelques projections de films expressionnistes allemands des années 20 et on tombe nez à nez avec un Frankenstein d'époque muet en noir et blanc. On découvre aussi quelques photos spirites où, avant photoshop et le numérique, quelques habiles malins faisaient apparaître esprits et fantômes aux côtés de gens bien vivants.
En tout état de cause ce terme romantisme noir me plait bien et je pense que je vais sans doute le réutiliser.
Revenons en a l'origine du nom de l'exposition, L'ANGE DU BIZARRE est le nom d'une nouvelle publiée par EDGAR ALLAN POE en 1844. POE icône incontournable du gothique, de l'étrange et d'un certain romantisme. Car c'est là l'un des points que je retient, littérature et peinture dans ce domaine sont inextricablement liées. L'inspiration des peintres outre le folklore, la mythologie et les misères humaines est souvent lié à des œuvres littéraires par exemple SHAKESPEARE ou DANTE, qui ont déjà été cités ici. Il faut dire qu'en matière de littérature, un mouvement nait fin du 18° en Angleterre le Gothic horror avec des auteurs comme HORACE WALPOLE, ANN RADCLIFF suivrons plus tard SHELLEY (bien qu'ici la science tienne une place assez importante) POE (outre atlantique) et bien plus tard BRAM STOCKER et consorts mais cela n'est plus alors qualifié de Gothic horror mais de littérature fantastique. Je ne vais pas faire ici l'historique de l'évolution du mouvement gothique des origines à nos jours, mais la version moderne des vampires, monstres, revenants, et autres créatures interlopes, même MARYLIN MANSON et la maison hantée de DISNEY puisent leur origines dans ces sources littéraires et œuvres de peinture classiques.
Pour continuer à en savoir plus sur tout ce qui tourne autour de cet univers je vous conseille la visite d'un autre blog : le diable et la mort petit tour d'horizon dans l'art.
Bien, il est tant de sortir car il est l'heure de l'évacuation, pour l'anecdote sachez que nous avons failli passer une nuit au musée, les guides pensant que tout le monde était sorti.
Pour finir quelques clichés des magnifiques er monumentales statues d'animaux qui se trouvent devant le musée. Cheval de PIERRE LOUIS ROUILLARD et éléphant d'EMMANUEL FREMIET. Ces statues datent de l'expo universelle de 1878, elles ont été placée devant le musée d'Orsay en 1980.
à suivre découverte de la conciergerie